Titre

Les Sarrasins du Nord: une histoire littéraire de la croisade balte

Auteur Loïc CHOLLET
Directeur /trice Jean-Daniel Morerod
Co-directeur(s) /trice(s)
Résumé de la thèse

Dans la lignée de l’histoire connectée, ce travail s’intéresse à un vaste mouvement relativement méconnu dans les pays francophones, et qui touche à l’évangélisation de l’une des dernières populations non-chrétiennes d’Europe : les habitants du sud-est de la mer Baltique. Considérées comme des croisades, les expéditions contre les païens baltes attirent de nombreux chevaliers d’Europe occidentale, surtout lors des derniers siècles du Moyen Âge. L’Ordre des Chevaliers teutoniques, établi dans les provinces de Prusse et de Livonie, organise deux fois par années des expéditions militaires contre les Lituaniens, derniers païens de la région. Après la perte des dernières possessions chrétiennes de Palestine, la croisade balte permet de continuer la guerre contre les « ennemis de la foi » dans une autre partie du monde. De ce fait, une grande partie des acteurs de la Guerre de Cent ans ont été des « voyageurs » de Prusse. Parmi eux, le célèbre maréchal Boucicaut ou Henri de Lancaster, le futur Henri IV d’Angleterre, mais aussi des personnalités moins connues nous ayant laissé de riches témoignages, comme l’écrivain et conseiller royal Philippe de Mézières, ou l’écuyer bourguignon Guillebert de Lannoy.

Travaillant à partir des documents littéraires produits en France et en Angleterre (chroniques, récits de voyage, poèmes, romans), l’auteur essaye de reconstituer les motifs et les attentes des hommes qui ont quitté leurs terres et leurs fonctions pour se rendre, pendant quelques mois, auprès des Chevaliers teutoniques. Pour la plupart d’entre eux, la guerre contre les « Sarrasins » du Nord était une échappatoire, permettant à ces seigneurs impliqués dans la cruelle Guerre de Cent ans de se rassurer sur leur statut, et de vivre une expérience chevaleresque digne des romans courtois. Un certain nombre de textes permettent en outre de se faire une idée de la façon dont les hommes et leur environnement étaient vus par les voyageurs venus de l’Ouest : une partie importante de ce travail est consacré à la représentation du monde balte dans les lettres françaises et anglaises. Loin de n’être que des ennemis bons à convertir ou à tuer, les « Sarrasins » de Lituanie étaient considérés comme des adversaires respectables, voire comme des modèles dont la noblesse de France devrait s’inspirer. Depuis les encyclopédistes du XIIIe siècle, certains auteurs occidentaux s’intéressent à leurs mœurs et tentent de comprendre leur mode de penser, leur spiritualité. En dépit d’une idéologie de croisade plaçant la conversion des « mécréants » comme horizon d’attente, clercs et chevaliers savaient faire preuve de curiosité pour ces païens du nord, considérés pourtant à priori comme des « Autres » absolus, leur religion n’étant pas un monothéisme.

Zone frontière par excellence, la région balte est un observatoire privilégié permettant de voir comment s’est effectué le passage de la croisade à la découverte du monde. Au-delà du cas balte, ce travail aborde donc la pratique du voyage aristocratique et la construction des savoirs qui redessinèrent la carte mentale européenne aux XIVe et XVe siècles.

 

Statut terminé
Délai administratif de soutenance de thèse 2017
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